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Le rôle des
medias dans la société
1. Définition
Mot né dans les années 20, mass-media est un
mélange de latin et d’anglo-américain : un medium, sans accent est un
mot
latin, qui signifie initialement à la fois un milieu et un
intermédiaire. Mass
est un mot anglais lié à la société industrielle.
« Mass media » est bien en effet une notion liée
aux innovations de l’ère industrielle (cinéma, affiche, radio,
télévision,
presse). Le terme se réfère aux moyens de communication destinés aux
masses,
selon un schéma un-vers-tous. Ils permettent de toucher immédiatement
des
audiences nombreuses et physiquement dispersées. Le public concerné
tend à être
anonyme (de moins en moins déterminé par la catégorie sociale, l’âge,
le sexe,
l’ethnie, etc. puisque tout le monde a accès à la consommation
médiatique).
D’autre part les mass-media supposent consommation rapide et
renouvellement
perpétuel.
Or, cette idée de « masses » n’est pas une notion
des plus claires. Certains entendent par là « beaucoup de gens » (ce
qui n’est
guère scientifique) ; d’autres des publics « massifiés », transformés
en
éléments indistincts, ce qui revient à présumer de leur influence et
poser que
la société moderne, contrairement à celles qui la précèdent serait «
l’ère des
masses ».
2. Les instruments des
medias
La
radio, dans les zones
rurales, la télévision, dans les
centres urbains, sont de très loin les principales sources
d'information et de
culture de la majorité des hommes et des femmes à la surface du globe :
les
plus accessibles, même aux analphabètes, les plus proches, les plus
baignées
dans la vie quotidienne des citoyens et dans l'identité de chaque pays.
Mais,
l’expérience a montré que les médias « classiques » la télévision, la
radio
pouvaient viser des publics très spécialisés et que leurs contenus se
diversifier à mesure qu’ils se multiplient.
Dans les années 70/80 , on commence à parler des «
self média » : radios communautaires ou locales, puis explosion des
chaînes de
télévision spécialisées. Il semble évident que les vecteurs vont se
multiplier
(à bon marché dans le cas des radios libres, moins dans celui des
télévisions),
permettant à chaque «sensibilité » ou à chaque communauté de parler et
de
s’informer de ce qui l’intéresse.
C’est une tendance lourde : le mouvement général
de diversification des médias permet à chacun de retrouver un média qui
réponde
à une caractéristique de son identité. D’où la floraison des médias
communautaires ou tribaux : chacun peut en quelque sorte se spécialiser
suivant
un critère communautaire : une religion, une origine ethnique, un style
de vie,
une passion sportive, une certaine esthétique. Médias « généralistes »
qui
permettent de se retrouver autour de références communes et médias
identitaires
ou tribaux coexistent. Parallèlement, les différences culturelles
résistent
singulièrement à la force supposée d’unification ou de standardisation
des mass
media.
Malheureusement, dans leur
grande majorité, les radio-télévisions
sont aujourd'hui entre les mains d'états qui en ont fait des
instruments de
propagande dépourvus de crédibilité, incapables de fournir à
l'auditeur-téléspectateur les éléments d'une appréciation objective de
la
réalité proche et lointaine du monde dans lequel il vit.
Au déficit reconnu des radio-télévisions d'état en cette
matière, deux
solutions sont le plus souvent mises en avant : les
stations commerciales et l'internet.
Les radio-télévisions
commerciales apportent une pluralité des sources qui oblige
l'information
officielle à moins négliger les faits. Elles sont une composante
nécessaire du
paysage audiovisuel. Mais leurs liens avec les puissances économiques,
souvent
aussi avec le pouvoir politique, leurs dépendance de plus en plus
répandue
vis-à-vis de grands groupes multinationaux, ne garantissent ni leur
autonomie,
ni leur souci de répondre aux besoins et aux attentes de la société où
elles
opèrent. La représentation des minorités, déterminante à maints égards,
ne
saurait être leur préoccupation principale, pas plus que l'universalité
d'accès
à toutes les couches de la population, même les plus pauvres ou les
plus
reculées…
Chacun peut se composer sa petite bulle
informationnelle à sa guise : ce qui était déjà vrai avec la
diversification de
l’offre de radio ou de télévision, devient encore plus évident avec les
technologies
numériques. Beaucoup sont tentés de voir en
Internet le contraire des mass media : chaque utilisateur peut
théoriquement devenir émetteur à son tour, les contenus semblent
infiniment
diversifiés, le récepteur peut très bien ne plus se contenter de
recevoir des
messages fabriqués « à la chaîne » pour un public moyen présumé. Ainsi,
un CD
Rom ou un DVD, où l’utilisateur peut naviguer à sa guise, ou interagir
avec un
logiciel est un « mass media », fabriqué à des millions d’exemplaires.
Par
contre personne ne l’utilisera exactement de la même façon que son
voisin ni ne
recevra exactement le même message.
Une très large proportion des consommateurs
d’information numérique deviennent producteurs (par exemple sous forme
de blogs
ou en publiant des photos ou des vidéos en ligne), coproducteurs ou
encore «
monteurs » de leur propre programme. N’importe qui peut s’organiser une
page de
favoris pour suivre en permanence tous
les sites (y compris les agences de presse) se rattachant à son sujet
favori.
Il dispose ainsi d’une capacité de documentation gratuite très
supérieure à
celle d’un journaliste professionnel d’il y a vingt ans, quand il
fallait
s’abonner à des agences et réunir de la documentation papier. Les flux
surabondants d’informations mettent chaque citoyen en mesure de
rivaliser avec
une vraie rédaction. Or tout cela serait impossible sans la profusion
des
médias numériques, ce que résume très bien le slogan : « Cessez de haïr
les
médias, devenez les médias ». Ou dans un autre registre « Tous
journalistes ».
Cela devient de plus en plus facile quand n’importe qui peut publier
des photos
ou vidés numériques, tenir son blog, participer à des forums, monter
des
mouvements cybermilitants, des observatoires, des collectifs, etc. en
quelques
clics.
De telles possibilités inhérentes à la technique
renforcent une tendance lourde de nos sociétés postmodernes. Le passage
des
systèmes d’autorité aux systèmes d’influence.
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Dans un système d’autorité, il s’agit de conquérir
le pouvoir (par les élections ou par la révolution), pour ensuite
transformer
le monde conformément à un projet central et unificateur. La question
de la
représentation politique est donc centrale, comme est central le « lieu
« du
pouvoir, l’État.
Dans un système d’influence, le contrôle des
citoyens (ou de ceux qui parlent en leur nom comme « représentants de
la
société civile ») se développe par la surveillance, la dénonciation, la
prise à
partie (notamment judicaire) de toute forme de pouvoir délégué. Une
double
logique se développe : emprise des médias (au sens du pouvoir de
condamner
moralement, d’exiger un comportement conforme à certaines normes, de
contrôler,... ) mais aussi nouvelle militance « à la carte » (qui dans
un
problème local, qui autour de question d’identité sexuelle ou
culturelle, de
protection de l’environnement, de droits de l’homme, de telle ou telle
cause
plus ou moins spécialisée).
On peut enfin comprendre que les mass media sont
des industries et sont soumis aux conditions de la production de
masses, qui
permet de reproduire un message en de multiples exemplaires (ou de le
répandre
sur de vastes zones géographiques) ce qui revient à mettre l’accent sur
la
technique.
Par ailleurs, l’idée même que les médias modernes
soient nécessairement « de masses » ou « massifiants » est de plus en
plus
douteuse.
Au-là de leur rôle évident, « l’expression
citoyenne », les médias numériques accessibles à tous ont de multiples
dimensions : fonction de veille et de surveillance, de mise en forme de
l’opinion par circulation des thèmes et messages au sein de
cybercommunautés,
ou encore de mobilisation assistée par ordinateur (qui permet notamment
au
mouvements protestataires altermondialistes d’exister à la fois comme
force
médiatique et comme force de mobilisation physique très spectaculaire,
notamment lors des forums et contre-sommets).
Le mouvement touche aussi et surtout les pouvoirs
économiques, à la merci d’une attaque contre leur réputation, d’une
dénonciation, d’une notation. Le peuple-surveillant et le
consomateur-juge ne
peuvent pas non plus exister sans la médiation de technologies de
l’information
et de la communication : ils semblent promettre de réaliser un rêve d’omniprésence. Dans la société en réseaux,
les réseaux d’information, pression et action prolifèrent par
définition.
Plus exactement, le pourvoir se déplace du pouvoir
d’ordonner et de publier, au pouvoir de juger et de diriger
l’attention. Car,
bien sûr, la multiplication des médias aboutit souvent à leur
auto-annulation.
Ainsi 95% des blogs ne sont lus que par leurs auteurs, et la plupart
disparaissent en quelques mois. La prolifération du bruit et de
l'insignifiance
devient une donnée nouvelle quand tout le monde peut tout dire...
3. Media – un
terme en permanente évolution
transfiguration
Contre les abus des pouvoirs, la presse et les
médias ont été, pendant de longues décennies, dans le cadre
démocratique, un
recours des citoyens. En effet, les trois pouvoirs traditionnels -
législatif,
exécutif et judiciaire - peuvent faillir, se méprendre et commettre des
erreurs.
Dans un tel contexte démocratique, les
journalistes et les médias ont souvent considéré comme un devoir majeur
de
dénoncer ces violations des droits. C’est pour cette raison que l’on a
longtemps parlé du « quatrième pouvoir
». Ce « quatrième pouvoir » était en définitive, grâce au sens civique
des
médias et au courage de journalistes audacieux, celui dont disposaient
les
citoyens pour critiquer, repousser, contrecarrer, démocratiquement, des
décisions illégales pouvant être iniques, injustes, et même
criminelles, contre
des personnes innocentes.
Depuis une quinzaine d’années, à mesure que
s’accélérait la mondialisation libérale, ce «
quatrième pouvoir » a été vidé de son sens, il a perdu peu à peu
sa
fonction essentielle de contre-pouvoir. Cette choquante évidence
s’impose en
étudiant de près le fonctionnement de la globalisation, en observant
comment un
nouveau type de capitalisme a pris son essor, non plus simplement
industriel
mais surtout financier, bref un capitalisme de la spéculation. En cette
phase
de la mondialisation, nous assistons à un brutal affrontement entre le
marché
et l’Etat, le secteur privé et les services publics, l’individu et la
société,
l’intime et le collectif, l’égoïsme et la solidarité.
La mondialisation, c’est donc aussi la
mondialisation des médias de masse, de la communication et de
l’information.
Préoccupés surtout par la poursuite de leur gigantisme, qui les
contraint à
courtiser les autres pouvoirs, ces grands groupes ne se proposent plus,
comme
objectif civique, d’être un « quatrième pouvoir » ni de dénoncer les
abus
contre le droit, ni de corriger les dysfonctionnements de la démocratie
pour
polir et perfectionner le système politique. Ils ne souhaitent même
plus
s’ériger en « quatrième pouvoir », et encore moins agir comme un
contre-pouvoir.
Les moyens
de communication de masse (stations de radio, presse écrite, chaînes de
télévision, Internet) se regroupent de plus en plus au sein
d’architectures
énormes pour constituer des groupes médiatiques à vocation mondiale.
Des
entreprises géantes ont désormais de nouvelles possibilités d’expansion
en
raison des bouleversements technologiques. La « révolution numérique »
a brisé
les frontières qui séparaient auparavant les trois formes
traditionnelles de la
communication : son, écrit, image. Elle a permis l’apparition et
l’essor
d’Internet, qui représente un quatrième mode de communiquer, une
nouvelle façon
de s’exprimer, de s’informer, de se distraire.
Depuis, les entreprises médiatiques sont tentées
de se constituer en « groupes » pour rassembler en leur sein tous les
médias
classiques (presse, radio, télévision), mais également toutes les
activités de
ce que nous pourrions appeler les secteurs de la culture de masse, de
la
communication et de l’information.
En d’autres termes, les groupes médiatiques
possèdent désormais deux caractéristiques nouvelles : premièrement, ils
s’occupent de tout ce qui relève de l’écrit, de tout ce qui relève de
l’image,
de tout ce qui relève du son, et diffusent cela au moyen des canaux les
plus
divers (presse écrite, radios, télévisions hertziennes, câble ou
satellite, via
Internet et par toutes sortes de réseaux numériques). Seconde
caractéristique :
ces groupes sont mondiaux, planétaires, globaux, et pas seulement
nationaux ou locaux.
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